Bas-Congo:Sans aide les séropositifs retombent dans la clandestinité

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Jacqueline Mbatshi console Françoise,une Pvv/Photo infobascongo

 

Jacqueline Mbatshi console Françoise,une Pvv/Photo infobascongo
Jacqueline Mbatshi console Françoise,une Pvv/Photo infobascongo

(Syfia Grands Lacs/Rd Congo) A cause de la mauvaise gestion des activités d’un bon nombre d’associations de lutte contre le sida du Bas-Congo, des personnes séropositives qui les fréquentaient pour y recevoir soins et assistance, les désertent et replongent dans la clandestinité. Un revirement de situation inquiétant.

 Dans la cité de Mbanza Ngungu à 215 km de Matadi, chef-lieu de la province du Bas-Congo, une association qui s’occupe des Pvv (Personnes vivant avec le Vih/Sida) au nom de  Nzambi Nkua Nkenda (Dieu Miséricordieux), voit chaque jour ses rangs se vider. En très peu de temps elle a perdu 16 des 30 Pvv qu’elle encadrait. Celles-ci y bénéficiaient d’antirétroviraux et fabriquaient des savons, ce qui leur permettait de gagner leur vie. Mais la savonnerie ne fonctionne plus après qu’un membre de l’association ait emporté la caisse, poussant les Pvv à partir. 

La situation est la même dans la dizaine d’associations du genre que compte la province. Au fil des jours et depuis plusieurs mois, suite à la mauvaise gestion de leurs activités de lutte contre le sida, les personnes séropositives qu’elles encadraient les quittent une à une. « Elles ne trouvent plus intérêt à évoluer dans les associations« , affirme Liévin Nkunga, de Groupe Bana Tshela, à 210 km de Matadi. Jeunes pour la plupart, ces personnes retrouvent ainsi progressivement la clandestinité, alors qu’elles en étaient sorties il y a quelques années pour aller vers ces associations.

Grosses inquiétudes

Secrétaire de l’Union congolaise des personnes vivant avec le virus (Ucop+), Françoise Kapinga explique ce revirement subit de la situation. « Lorsqu’une personne séropositive a la garantie de sa survie, elle ne tient pas compte des regards discriminatoires« , dit-elle. Elle affirme que « les Activités génératrices de revenus (Agr, selon le vocabulaire des bailleurs de fonds) permettent aux Pvv de se prendre en charge et d’éviter de se cacher. » Lorsque le financement de ces activités est mal géré et que les associations n’ont plus de sous pour continuer à fonctionner, les séropositifs s’enferment chez eux.

Cette évolution inquiète tout le monde. Car, une fois dans la clandestinité, les Pvv adoptent parfois des comportements à risque. « Elles peuvent être la source de propagation de la maladie« , avertit le Dr Emmanuel Mpanzu, superviseur du Projet Amitié qui lutte contre le sida au Bas-Congo. Son collègue Béa Ilunga de Amo Congo, qui fait de même, ajoute que ces gens sont aussi gagnés par l’envie du suicide. « Lorsque leur psychologie est atteinte, la mort les emporte« , explique-t-il.

Entre 2004 et 2009, la Banque mondiale a accordé 102 millions de dollars au Programme national multisectoriel de lutte contre le sida (Pnmls) de la Rd Congo, pour financer les activités des associations qui apportent leur soutien aux personnes séropositives. D’autres financements proviennent de l’Unicef, du Pnud ou de l’Usaid. Mais d’après le coordonnateur du Pnmls au Bas-Congo, Matthieu Luvunu, « ce n’est pas assez » vu le nombre des personnes atteintes. Le taux de prévalence du Vih/sida se situe autour de 5 % dans le pays, pour une population estimée à 60 millions d’habitants.

 Contrôler la gestion des associations

La gestion de ces financements varie d’une association à l’autre. Certaines investissent dans le développement des Agr, d’autres accordent directement de petits montants aux Pvv, pour qu’elles se lancent dans des activités de leur choix. Mais comme le souligne Dr Marcel Mbaya de Amo Congo, « l’argent est source des discordes dans les associations. » Les détournements de fonds sont en effet monnaie courante à Matadi et dans d’autres villes de la province. « Le Pnmls tente de suivre de près leur gestion« , essaie de rassurer Matthieu Luvunu.

D’autre part, les Pvv qui reçoivent directement un financement trouvent le montant qu’on leur donne très maigre. « Avec 100 $ je ne peux pas faire grand-chose« , explique une sidéenne qui s’était lancée dans le tricot de vêtements pour bébés. Dans les associations certains les accusent d’y venir « dans le but de gagner de l’argent. » Selon Emmanuel Mpanzu, très peu de Pvv parviennent à pérenniser leurs activités. Les rares qui ont pu fructifier leur petit capital et s’épanouir sont souvent invitées à des rencontres pour partager leur expérience. Matthieu les encourage à « travailler avec le peu de moyens qu’on leur donne pour réussir leur prise en charge. »

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