Sud-Kivu: Des enseignants perdent leur emploi en raison de leur religion

0
107
les élèves de primaire

les élèves de primaire

(RCN J&D-InfoSud/Syfia/PML) Au Sud-Kivu, dans le territoire de Kalehe, beaucoup d’enseignants des écoles confessionnelles de Minova sont renvoyés pour ne pas appartenir aux églises qui gèrent ces établissements. Une pratique illégale, mais les victimes ne s’en plaignent pas, car elles ne connaissent pas leurs droits.

Un cas parmi d’autres… En février dernier, Ezéchiel Batumike, enseignant en 6ème année primaire de l’école catholique Shanga à Minova (150 km au nord de Bukavu), a été renvoyé pour avoir prié dans la communauté internationale protestante des hommes d’affaires du plein évangile. « La direction de l’école m’a demandé de me convertir au catholicisme sous peine de perdre mon boulot. J’ai refusé… » En 2011, Lajoie Ndamwenge s’acquittait avec satisfaction de ses tâches d’enseignante à l’école primaire catholique de Minova. Par ailleurs sous gérante de la 5ième Communauté des Eglises baptistes au centre de l’Afrique, elle a perdu son travail, parce qu’elle priait à l’assemblée chrétienne de Bishago.

Dans toutes les écoles confessionnelles, les enseignants de Minova vivent sous la même menace. En particulier ces deux dernières années, depuis que différentes religions ont créé de nouvelles écoles. Certains ont même perdu leur emploi pour avoir épousé un conjoint qui ne croyait pas à la doctrine de l’église fondatrice de leur établissement. C’est le cas d’Anuarite Cikuru, qui enseignait à l’école primaire catholique Keya à Minova et venait de se marier à un croyant de l’assemblée chrétienne protestante.

Pourtant, l’alinéa 3 de l’article 36 de la Constitution de la RDC dit : « Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de son sexe, de ses opinions, de ses croyances ou de ses conditions socio-économiques« . Ce droit est renforcé par l’article 8 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ratifiée par la RDC : « La liberté de conscience, la profession et la pratique libre de la religion, sont garanties« .

Tout le monde semble perdant…

Plusieurs responsables des églises de Minova justifient ces pratiques de la même façon que Prudent Bilagalaga de l’église adventiste du 7ième jour : »Nous avons le devoir de matérialiser l’évangélisation à travers des actions et œuvres sociales. Mais, pour des raisons liées à la doctrine, nous devons recruter les enseignants au sein de nos fidèles, mieux informés pour continuer l’œuvre évangélique dans leurs classes respectives. Il en est de même dans nos structures sanitaires où le personnel soignant est de notre église. »

D’autres recrutements s’effectuent sur base de recommandations des pasteurs des églises locales. Pour Christophe Lubao de la 8ième Communauté des églises de pentecôte au centre de l’Afrique, « un non protestant ne peut pas être recommandé par un protestant ». Bien que connaissant la loi interdisant cette pratique, ces hommes de Dieu soutiennent que des conventions signées avec l’Etat congolais leur permettent d’être autonomes quant au recrutement de leur personnel. Pour Masumbuko Kazingufu, pasteur responsable de la 34ème Communauté des assemblées de Dieu en Afrique : « Recruter un incroyant, c’est s’attirer des ennuis ! Entre gestionnaires des écoles et professeurs incroyants, la mésentente est permanente. Ces derniers, imbus d’orgueil scientifique, refusent d’enseigner la religion qui est un cours fondamental pour les élèves avant l’âge adulte. »

Les différences de convictions religieuses ne sont tolérées que plus tard, dans les écoles secondaires, où le recrutement s’effectue sur base des compétences, comme l’explique Prudent Bilagalaga. « A l’école secondaire, nous pouvons engager un non adventiste pour sa spécialité, mais à l’école primaire, il faut un adventiste croyant et pratiquant« .

Face à cette relative intransigeance, tout le monde semble perdant… Les écoles confessionnelles ratent des opportunités d’embaucher de bons enseignants qui s’orientent de plus en plus dans des écoles privées où la liberté de culte est garantie. D’autres changent carrément de métier. « Je fais désormais le petit commerce. J’en suis satisfaite, car mon revenu actuel me permet de satisfaire tous mes besoins« , explique par exemple Lajoie Ndamwenge, qui n’envisage pas de redevenir un jour enseignante.

Par Gédéon Mirindi Masumbuko

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site est protégé par reCAPTCHA et la Politique de confidentialité, ainsi que les Conditions de service Google s’appliquent.