Bas-Congo :Privilégier ses enfants plutôt que ses neveux

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Des enfants dans la rue le 08 mars 2010/Photo d'illustration/Infobascongo

des enfants dans la rue le 08 mars 2010/Infobascongo

(Syfia Grands Lacs/ RD Congo) Au Bas-Congo, au sud-ouest de Kinshasa, les parents sont de moins en moins nombreux à prendre en charge leurs neveux au détriment de leurs propres enfants comme le veut la tradition. Ils privilégient désormais la famille restreinte, convaincus que les enfants sont les plus à même de s’occuper de leurs parent

« J’ai hébergé chez moi et soutenu durant ses études un neveu qui vit actuellement en Europe. Je n’ai jamais reçu un coup de fil. Je me suis rendu compte qu’il s’occupe de ses parents et non pas de moi, son oncle », raconte, un brin amer, un habitant de Nzanza, un quartier pauvre de Matadi, chef-lieu du Bas-Congo au sud-ouest de Kinshasa.

Dans cette province et dans celle voisine du Bandundu, c’est le matriarcat qui régit la société. Ce système veut que les femmes (mères) jouent un rôle prépondérant dans la perpétuation de la lignée. Selon la tradition Kongo (Bas-Congo), les enfants appartiennent  à la maman. Après la mort du père, la veuve retourne chez ses parents avec les orphelins. Une réalité encore très vivace en milieu rural. Il arrive même que des parents préfèrent faire étudier leurs neveux et nièces aux dépens de leurs propres fils. Et en cas de problème, ils n’hésitent pas à leur demander d’aller voir leurs oncles maternels. Au lieu de « gaspiller » en investissant chez tous les enfants, c’est souvent un seul, l’ainé de la fratrie, qui est favorisé pour qu’il devienne, une fois finies les études, celui qu’on appelle dans ces milieux « Likonzi ya famille » (l’appui ou le soutien de la famille, ndlr).

La société évolue malgré les résistances

« On n’y pouvait rien. Avec ce système parental, nous devions absolument aider les neveux puisqu’ils sont les enfants de ma sœur. C’est une manière pour nous de garder l’héritage de la famille », explique un parent qui dit avoir changé. Il a même chassé de son toit ses neveux, déçu par l’ingratitude de l’un d’eux parti en Angola et qui ne s’occupe que de ses propres parents et jamais de lui. « J’ai finalement compris que l’enfant c’est moi, c’est mon sang. J’ai des problèmes dans ma famille (élargie) puisque j’ai décidé de ne m’occuper que de mes propres enfants, de faire d’eux une priorité« , poursuit-il.

A cause de plusieurs déceptions accumulées et grâce aux contacts avec les autres cultures, cette tradition tend de plus en plus à disparaître, surtout en milieux urbains. Et la nouvelle génération n’a plus peur de passer outre les coutumes. « Jamais un neveu n’a pu acheter ne fût-ce qu’une voiture à son oncle mais l’enfant, lui, peut tout faire pour ses parents », déclare sous anonymat un parent de Matadi.

Pour Oscar Bafuka, père de huit enfants, plusieurs facteurs ont milité pour ce changement. « La pauvreté m’a amené à m’occuper des miens. Mais il faut reconnaître aussi que la culture change, observe-t-il. Surtout à Matadi comme c’est une ville cosmopolite,  les mouvements migratoires y ont contribué pour beaucoup. Aujourd’hui, les parents donnent priorité d’abord à leurs enfants en tout et pour tout ». Robert Mvuza, un autre habitant de Matadi garde, lui, encore en mémoire un mauvais souvenir. Il y a quelques années, après la mort de son père, les neveux de ce dernier ont vendu la maison familiale qu’il occupait. « Ils ont même obtenu un faux document niant notre paternité. Heureusement, j’ai pu obtenir gain de cause devant les juges », se rappelle-t-il. Pour lui, « les neveux sont les premiers ennemis de mes enfants et de mon épouse. Je vais m’épuiser pour mes propres enfants d’abord« .

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