Kinshasa : les médecins grévistes radicalisent leur mouvement

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consultation populaire par les femmes médecins /infobascongo

En grève depuis le 2 septembre, les médecins des services publics de l’Etat de Kinshasa, la capitale congolaise, radicalisent leur mouvement. Le gouvernement n’a en effet pas accédé à leur principale revendication portant sur l’augmentation des salaires aujourd’hui très faibles. Les malades sont inquiets.

Hôpital général de Songololo/Infobascongo
Hôpital général de Songololo/Infobascongo

Les médecins des services publics de l’Etat ont décidé, le 24 septembre, de radicaliser leur mouvement de grève commencé le 2 septembre. Le gouvernement congolais et leur syndicat n’ont pu parapher le protocole d’accord fixant les primes et indemnités qu’ils réclament dans la nuit du 20 septembre, malgré d’intenses négociations. A la place, un simple communiqué sanctionnant la fin des pourparlers cache mal l’impasse entre les parties.
Sur les sept revendications des syndicats des médecins, elles se sont accordées sur six points. La discussion sur la rémunération reste ouverte, mais renvoyée au budget 2014 en cours d’élaboration. Ce que ne veulent pas entendre les médecins. A moitié satisfaits de ces acquis, ils refusent d’enfiler leurs blouses blanches et de reprendre du service. Lors de la restitution en interne par les syndicats des conclusions des négociations le 24 septembre, sur les 23 institutions publiques de santé œuvrant dans la capitale, une seule, la Clinique Ngaliema, a voté pour la levée de la grève.

Hôpitaux sans médecins
Dans leur grande majorité, les médecins ont alors décidé de donner un tour de vis à leurs revendications en optant pour une grève blanche « hôpitaux sans médecins ». « Nous supprimerons les urgences, le service minimum et nous resterons à la maison… », a déclaré le Dr Eric Mukenge du Syndicat des médecins (Synamed). Avant de reprendre du service, ils demandent au gouvernement de répondre aux revendications contenues dans leur cahier de charges : la nomination des médecins (la dernière date d’il y a 20 ans) aux grades actualisés, la majoration de la prime de risque professionnel, l’alignement sur cette prime des médecins des nouvelles unités. « Il y a des médecins qui travaillent depuis deux ans sans prime de risque, sans salaire de l’Etat », fait remarquer Dr Eric Mukenge des Cliniques universitaires de Kinshasa. Quant à la rémunération, les médecins réclament qu’ils soient payés à leur taux de référence qui est celui d’un professeur ordinaire.
Actuellement, le salaire mensuel d’un médecin généraliste débutant (7 ans d’études supérieures) oscille autour de 100 $. Pour boucler leurs fins de mois, de nombreux médecins ont un pied dans le privé. Les grévistes espéraient mieux avec les pourparlers engagés avec le gouvernement. Ils réclament d’être payés au moins 1000 $ par mois. « Cela va permettre aux médecins de ne pas envier leurs collègues d’autres pays. C’est un minimum qui nous permet de rester au pays », assure le Dr Eric Mukenge. En radicalisant leur mouvement, les grévistes maintiennent la pression sur le gouvernement. Avant de décider de la grève blanche, les médecins grévistes sont passés du service minimum pendant 14 jours aux urgences alternées entre les hôpitaux pendant 10 jours.

Testament d’Hippocrate
Les familles des malades redoutent la radicalisation de cette grève. Assis depuis plusieurs heures devant la porte de l’imagerie médicale, leur bébé enroulé dans une couverture sur les genoux du père, Samuel et sa femme ont l’air abattu. Ils sont tristes de voir leur fillette, transférée à sa naissance le 11 septembre aux Cliniques universitaires pour y être opérée, ne pas l’être dix jours après. « Si ça continue, je vais perdre ma fille ! », laisse-t-il tomber. Le bébé doit passer au scanner avant d’être opéré. « A quoi sert finalement le fameux serment d’Hippocrate ? », s’indigne le papa. A cette question, le Dr Eric Mukenge oppose le testament d’Hippocrate, qui veut qu’un « médecin ait droit à un salaire décent qui lui permette de vivre dignement pour pouvoir soigner les autres… »

 

Didier Kebongo

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