Au Kongo central, au sud-ouest de Kinshasa, des réseaux bien organisés enlèvent des filles qu’ils séquestrent pour des fins sexuelles. Les dénonciations se soldent par des sanctions exemplaires.
Mercredi 27 septembre, Prisca*, une adolescente, 16 ans, kidnappée et retenue captive deux jours durant par un trentenaire, à Muanda, la cité côtière est conduite au bureau de police du territoire. Elle clopine, sa jupe maculée de sang. ‘’C’est une voisine qui est allée annoncer à sa mère que sa fille était retrouvée et son bourreau a été capturé par des jeunes de quartier qui l’ont remis à la police’’, explique Thérèse Musumadi, activistes des droits de la femme qui signale que douze autres cas d’enlèvements d’adolescentes ont été enregistrés depuis 2022. Le kidnappeur est aux arrêts après que le gouvernement provincial a diligenté une mission d’enquête.
A Boma, deuxième ville du Kongo central, à 100 km de Muanda, 19 filles, majoritairement mineures, de deux ans à 19 ans ont été enlevées et séquestrées au numéro 220 de l’avenue Kisantu, à Nzimuaka dans la résidence de Jean-Pierre Mbumba, 69 ans. Deux de ces filles ont été retrouvées sans vêtements devant ce monsieur de 69 ans, lui à moitié dénudé. ‘’Nous l’avons trouvé en plein ébats sexuels’’, a affirmé le commissaire de police Adolphe Mayiza. Ces filles sont de Boma, Kinza-Mvuete, Matadi… « Ils m’avaient pris à Manterne et ont promis de me conduire chez ma tante à Boma », explique l’une d’elle.
Dénoncer
Au Kongo central des enlèvements des enfants pour des fins sexuelles sont devenus monnaie courante. ‘’La nuit du mercredi à jeudi, nous avons intercepté un bus en provenance de Boma avec une vingtaine d’enfants. Ils ont passé deux jours chez nous à la mairie de Matadi. Au moment où je vous parle, nous avons démantelé un autre groupe en provenance du Bas-Fleuve. Ils sont 15 à la mairie’’, regrette Filbert Kumbu,chef de bureau 1. ‘Il faut lutter contre toutes ces violences qui concernent la femme et surtout la jeune fille, briser cette chaine’’, motive Me Ariane Kuanda, membre de l’Association des femmes juristes du Congo(Afejuco), Kongo central. Pour lutter contre ce fléau, son association sensibilise les habitants à dénoncer. ‘’ Les parents qui ne le font pas sont passibles des poursuites judicaires’’, prévient Me Bébé Uwanji, avocate..
Des sanctions
Petit à petit la mentalité est en train de changer. Jean-Pierre Mbumba a été dénoncé début juillet part un voisin. Le tribunal de grande instance de Boma,dans une audience foraine en procédure de flagrance l’a condamné à 20 ans de prison pour traite d’enfants et tentative de viol. Il doit payer des dommages et intérêts respectivement de deux millions de francs congolais(800 dollars) pour chacune des victimes et de deux millions cinq cent mille(1000 dollars) pour celles dont les parents se sont constitués partie civile. Le ministre de Droits humains Albert Puela qui a conduit une délégation tripartite présidence de la République-gouvernement- OIM avait fait savoir que « des mesures étaient en train d’être prises pour l’encadrement des ces filles ». Mais la sentence est minime selon Édouard Matungulu , procureur de la République près ce tribunal car, arguait-il, « il faut réprimer sévèrement ce mal ». Le barreau du Kongo central a envoyé des avocats qui ont plaidé pro deo. ‘’ Ce sont des actes à décourager’’, a soutenu le bâtonnier Cherine Luzaisu. Le bourreau de Prisca a lui aussi été dénoncé. Cependant, Docteur Batela, chargé des violences basées sur le genre à l’hôpital général de référence de Boma encourage,lui aussi, « à porter plainte et à conduire dans les 72 heures la victime à l’hôpital’’. ‘’Si elle est vite prise en charge médicalement, on lui évitera des infections, une grossesse indésirable…’’, conseille-t-elle.
Prisca*,le prénom a été changé
